Crypter l'intime et l'afficher. Le Soleil

JOSIANNE DESLOGES 

(Québec) En ces jours de course électorale où l'espace public est saturé de pancartes et de slogans tapageurs, un tout autre type de bannière, poétique celui-là, a été affiché à l'arrière du Théâtre de la Bordée. Il s'agit d'une oeuvre de Nadia Myre et de Karen Elaine Spencer, inspirée de la pièce Frozen, présentée ces jours-ci de l'autre côté du mur.

La grille de formes bleues et blanches s'appelle Frozen Blue et, en regardant plus attentivement, on peut y discerner des lettres, des mots. Après avoir lu le texte dramatique, Myre et Spencer ont échangé sur les caractères des personnages qui se transforment, qui passent du vrai au faux, et sur cette idée d'être frigorifié à l'intérieur. De leur discussion est né le poème caché dans la bannière.

En cryptant son message, Spencer essaie de déplacer le regard du spectateur dans la marge des choses, explique Nadia Myre. «Nous faisons un peu la même chose. Cacher des mots. Dire et ne pas dire, être difficiles à lire.»

L'artiste algonquine a numérisé le travail graphique de sa collègue, comme elle le fait avec ses propres tissages de perles. «Ça rend l'image plus matérielle, on dirait», note celle dont on peut voir Meditations in Red dans l'exposition sur les autochtones C'est notre histoire au Musée de la civilisation. Elle est présentement au Mexique pour réaliser un projet de Land Art avec Sonia Robertson et Sophie Kurtness au festival Cumbre Tajin, qui s'articule autour de l'identité autochtone.

Il s'agit du premier projet d'art public pour la Galerie des arts visuels (GAV) de l'Université Laval, qui a eu un appui financier du cycliste, artiste et homme d'affaires Louis Garneau. «Nous voulions montrer que nous étions une entité qui ne se limite pas aux quatre murs de l'espace d'exposition, mais que nous pouvions développer un échange, une réflexion sur l'art, et s'inscrire dans notre milieu», indique Lisanne Nadeau, responsable de la GAV, qui a invité Nadia Myre à poursuivre son Scar Project, une oeuvre relationnelle sur les blessures de notre inconscient collectif et les cicatrices qu'elles laissent sur chacun, cet automne.

L'oeuvre hivernale, qui sera visible jusqu'au 11 avril, affiche plutôt une réflexion intime qu'elle brandit bien haut, tel un drapeau flottant sur le quartier Saint-Roch.

 

Top 10 Art contemporain, La Presse 2014

Mario Cloutier

Nadia Myre: l'engagement

« Tout influence tout », croit Nadia Myre. Pratiquant un art de l'engagement, l'artiste montréalaise de 40 ans estime que la reconnaissance du public, des pairs ou des médias « fait vivre le milieu des arts visuels ».

Finaliste au prix Waterhouse 2013, la jeune femme prépare un projet multimédia issu de sa série Cicatrice (Scar), qui sera présenté à l'automne chez Oboro. Elle participera également à un festival de la francophonie au Sénégal. « Ça va me permettre de sortir de mon image de l'artiste amérindienne », fait-elle en riant.

Ses oeuvres ont déjà été présentées sur quatre continents.

Source: http://www.lapresse.ca/arts/arts-visuels/2...

NADIA MYRE, THE SCAR PROJECT ET BEAT NATION, ETC. no 101

Anne-Marie Bouchard

Nadia Myre, The Scar Project, présenté à la Galerie des arts visuels de l’Université Laval. 28 novembre au 21 décembre 2013.

 

C’est à la suite de son projet Indian Act, impliquant la participation de personnes de divers horizons à son processus de création, que Nadia Myre a conçu The Scar Project. Le désir d’entamer un nouveau projet participatif et relationnel, doublé d’une réflexion de l’artiste sur des blessures personnelles, a permis de définir les lignes directrices du projet : réunir des individus dans des centres d’artistes ou des soupes populaires, leur fournir un canevas de quelque 20cm par 20 cm, du fil, des aiguilles, avec comme directive d’interpréter à leur manière sur le substrat une blessure, physique ou psychologique, puis de la raconter sur papier pour documenter la production de la « cicatrice ». La présentation toute récente de The Scar Project à la Galerie des arts visuels de l’Université Laval se voulait une synthèse du projet en cours depuis 2005 et dont la production s’est achevée en avril 2013, en marge de la Commission de vérité et de réconciliation du Canada mise sur pied à la suite de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens.

La présentation proposée dans la vaste salle de la galerie associait un accrochage de canevas, scindé par deux projections vidéo, à un amoncèlement de « cicatrices » au centre de la pièce. La mise en exposition mettait de l’avant une certaine progression/complexification dans le développement du symbole utilisé pour matérialiser la cicatrice sur le canevas, donnant à constater tout le spectre d’expression visuelle et écrite de la blessure : de la cicatrice physique, allant de la simple coupure parfois parfaitement suturée, du stigmate à demi-cicatrisé ou encore béant (inguérissable ou trop frais?), à la figuration d’un univers mental complexe révélant une blessure psychologique ou une rumination. Plongés dans une introspection contemplative durant la conception de leur cicatrice, les participants au projet laissent la trace, nécessairement unique, d’un ensemble de perceptions et de sentiments devant s’exprimer, peut-être pour la première fois, sous une forme synthétique. Placées en début de parcours, les cicatrices plus simplement littérales, qui ne sont pas sans rappeler des Lucio Fontana reprisés, amènent petit à petit à se plonger soi-même dans une telle introspection. L’intensification subséquente des symboles, parfois plus conceptuels, parfois rendus directement lisibles par un recours frontal à la figuration et à l’écriture, contribue à nous détacher de nous-mêmes pour nous plonger dans

la blessure de l’Autre. Le dessin schématisé d’une grossesse, accompagné d’un douloureux
« sorry », des peines d’amour adolescentes, des récriminations (« why didn’t you tell me
earlier »), parfois des symboles se détachant de la sphère de l’intime pour atteindre un espace public politique, des canevas intégralement défoncés ou délicatement troués, raccommodés de manière anarchique, constituent une charge émotive considérable que l’anonymat de l’ensemble vient universaliser. L’accrochage offert à la GAVUL donne aussi l’impression de percevoir, à travers cette progression du symbole simple au plus complexe, le processus d’intériorisation des blessures au fil du vieillissement. Ce qui est au commencement une trace physique unique se multiplie puis s’associe à des blessures, invisibles celles-ci, survenant au fur et mesure d’une prise de conscience de la place du Soi au monde et des douleurs engendrées par les dynamiques relationnelles toujours plus inextricables au sein desquelles l’on se retrouve en vieillissant. Un deuxième tour de la galerie permet de recentrer son attention sur des détails qui montrent que la conceptualisation des cicatrices par les participants manifeste parfois une volonté d’esthétisation de l’expression, consciente de l’espace artistique contemporain dans lequel se joue une partie de la production et la réception du projet.

À mi-chemin du parcours de l’expo, une digression médiatique rompt la contemplation des blessures anonymes pour se concentrer sur une blessure nommée, lentement décrite, témoignage de la mère de l’artiste, arrachée à sa famille, privée de son identité puis déplacée de famille d’accueil en famille d’accueil sans avoir jamais eu la possibilité de créer des liens affectifs durables. Le témoignage suivant, de l’artiste elle-même, atteste des répercussions profondes des politiques d’assimilation des autochtones sur les générations subséquentes, victimes du mal-être de leurs parents : « that my mother was in so much pain she could never attach herself to me was a deep wound. » Cette intégration de témoignages personnels, au centre des centaines de canevas anonymes, est le fruit d’un dialogue de l’artiste avec la commissaire de l’exposition et directrice de la GAVUL, Lisanne Nadeau, et contribue très efficacement à la synthèse du projet, s’il m’est permis d’exprimer aussi pragmatiquement, pour ne pas dire trivialement, mon « appréciation » de cette initiative qui rend surtout compte d’une grande sensibilité et de beaucoup de délicatesse dans la mise en exposition d’un projet aussi complexe que profondément bouleversant.

Le projet de Myre est puissant, dans sa conception, l’artiste ayant accompagné tous les participants et recueilli toutes leurs blessures comme autant d’occasions d’ajouter à sa réflexion sur ses propres blessures, ou de s’en détacher, dans un processus de création en forme de longue méditation1. Il est également puissant dans sa finitude, cet ensemble de centaines de canevas et d’archives se révélant être un enjeu d’exposition et de médiation considérable. Myre en a tiré un livre et en proposera, fin 2014, une nouvelle forme d’exposition médiatique immersive, point culminant d’une résidence à Oboro, sur laquelle je reviendrai assurément.

 

Chloë Charce, « Entre spirituel et politique, Nadia Myre balise son territoire », ETC, n° 96, 2012, p. 25-29.

THE TRULY MADE THINGS OF NADIA MYRE, Exhibition Essay, McLaren Art Centre

Colette Tougas

 

I believe very deeply that works of art, or let’s say things in the world, not just works of art, can be truly made. If they are truly made, in the sense of possessing themselves, then they are beautiful... The idea of the truly made does not only have to do with truth. It has to do with the meeting of material and non-material... [A] thing exists in the world because it has mythological, psychological and philosophical coherence. That is when a thing is truly made... 

—Homi K. Bhabha1

 

I remember hearing, several years ago, the American writer Spalding Gray in a radio interview during a literary festival somewhere in the United States. Gray mentioned having met Susan Sontag on that occasion and retold a conversation they had. She said that she always wrote from the same feeling and she was convinced that this was true of all writers. In her case it was from a feeling of loss and in Gray’s, if my memory serves me right, it was from anger.

I believe it is possible to apply this conception of a writer’s motivation to artists of all disciplines. However elusive it is, this basis in one’s own genesis gives a work its truly made feel or its soundness, if you will.

Nadia Myre has written that it is through the experience of claiming her mother’s and her own Native Status in 1997 that the exploration of her identity as a native woman took precedence in her work. She also noted that, as colonized peoples, the First Nations share a common experience of suffering and shame that she, as an artist, manifests and deconstructs in participatory works where she uses and explores her ancestors’ traditions. One could argue that this is the backdrop against which Myre designs and builds very contemporary manifestations of her primary concerns. ...

C'est notre histoire au Musée de la civilisation: en territories ami, Le Soleil

Québec) La nouvelle exposition permanente sur les autochtones du Musée de la civilisation (MCQ) métisse ethnologie, histoire et création artistique actuelle. Conçue de concert avec les 11 Premières Nations, C'est notre histoire, Premières Nations et Inuit du XXIe siècle nous amène sur des sentiers sensibles qui séduisent nos yeux autant qu'ils étoffent nos connaissances.

Des oeuvres d'art actuel

Partout, des oeuvres contemporaines créées par des artistes amérindiens ou inuits tissent des liens entre art et artefacts, entre mémoire et création. France Trépanier signe Cartographie imaginée, fait de résine, de cire d'abeille et d'objets collectés. Nadia Myre réfléchit sur l'identité liée au sang avec Meditations on Red 1, 2 et 3, trois impressions numériques circulaires où des perles blanches et rouges s'entrelacent comme des globules.

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Montréal au Fresnoy : l’image qui rode… Le Monde

Lunettes Rouges

 

Du Canada contemporain, on connaît ici d'abord Vancouver, Jeff Wall et ses amis, et puis, un peu Winnipeg, guère enthousiasmant : belle occasion d'aller au Fresnoy découvrir un peu la scène montréalaise (jusqu'au 5 janvier; commissaire : Louise Déry). Ou au moins sa composante vidéo et photo, autour des thèmes du reflet, de l'écho, de l'image latente, manquante, celle qui rode... Et aussi du son. La pièce la plus marquante de l'exposition est sans doute cette courte vidéo de l'artiste d'origine algonquine Nadia Myre, qui (sur un tout petit écran) émerge silencieusement du brouillard à contre-jour dans un canoë, forme étrange et mystérieuse qui petit à petit se dégage de la brume, image qu'il nous faut reconstituer patiemment, qui se précise et se compose lentement, interminablement. Quand elle se rapproche de nous, quand elle devient distincte, quand on espère distinguer ses traits au milieu du grain de l'image, elle nous jette un regard qu'on peut supposer indifférent, voire méprisant, et elle s'éloigne d'un coup de pagaie. Le film recommence alors et nous replongeons dans une méditation embrumée. C'est d'abord un travail politique, sur le point de vue ethnologique et l'image préconçue des premières nations (comme on dit au Canada), mais c'est aussi un travail poétique sur l'apparition, le reflet, le non-vu. À suivre.

Source: http://lunettesrouges.blog.lemonde.fr/2013...

GLOBE AND MAIL ‘EXPLODING THE BOX’

 

The knock on Sakahan – Algonquin for “to light a fire” – will be, of course, that it ghettoizes “aboriginal” or “native” or, as the National Gallery of Canada prefers, “indigenous art.”

If so, it’s a mighty capacious ghetto, not just for Sakahan’s stature as the biggest single exhibition in the NGC’s 130-year history (more than 150 works! 80-plus artists!) but for its scope (art from 16 countries on six continents, including India, Taiwan, Brazil and Mexico) and, most importantly, the astonishing variety of art presented, most of it made in the past 10 years.

This isn’t to say Sakahan stints on depictions of the myriad, often cruel legacies of the heritage that has shaped most indigenous societies since their initial contact with European colonizers.

For that, look no further than Nadia Myre’s interpretation, in beads of bloody red and white, of the first five chapters of Canada’s Indian Act.

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New York - Scope, Art Mûr, ESSE

ENRICO GOMEZ

Art Mûr
Scope, New York, March 6 – March 10, 2013

...The First Nations-themed works commanded attention with three large red and white circular compositions that read like digital colour-field mandalas or abstract targets. These digital prints, Meditation on Red (2013) by Anishinaabe artist Nadia Myre, give a close-up view of beadwork in Canadian flag colours, conflating issues of nationalism, Aboriginal heritage, and aesthetic modernism so subtly that it’s easy to initially miss their nuanced worth. 

http://www.esse.ca/fr/compte-rendu/78/NewYork6

Nadia Myre: Rethinking Anthem

De Garie-Lamanque, Ève

Nadia Myre est une artiste contemporaine et multidisciplinaire canadienne. Née en 1974 à Montréal, Québec, elle fut diplômée de l'Institute of Art and Design de Vancouver (1997) puis obtint une maîtrise en arts plastiques à Montréal, en 2002. Elle porte en elle deux patries, la première est québécoise (par son père) et la seconde algonquine (par sa mère); son statut d'autochtone perdu, par sa mère adoptée en dehors de la réserve, lui fut redonné en 1997. Au travers de différents médium, tels que le pochoir, la vidéo, la peinture, la sculpture, l'écriture et le perlage, Myre explore plusieurs thèmes tels que l'amour, la perte, l'espace, l'identité individuelle ou d'un groupe. Pour plusieurs projets, l'artiste va se réapproprier les techniques anciennes amérindiennes en les réactualisant sur un modèle contemporain. Souvent, elle introduira dans sa création, des objets hybrides faisant référence à sa position de métisse, comme si cette place ethnique était le chéneau manquant dans un dialogue jamais entamé, comme si ce statut avait le pouvoir de faire évoluer une histoire explosée. Elle relie, à défaut de recoller, ces morceaux d'un passé et d'un présent déchiquetés pour ne pas oublier, pour ne pas cliver des faits et des expériences entrées dans une histoire qui «oublie» trop souvent ses racines.

Rethinking Anthem 1 (2008), c'est une vidéo, l'image est en noir et blanc, un titre révélateur, trois minutes de questionnement, de réflexion, hors du temps, hors du bruit, plongées dans un univers presque enfantin car enrobées dans des traits de crayon, un fond blanc et des gestes. Ces derniers sont méticuleux, posés et d'une symbolique profonde. La vidéo commence, le cadrage est fixe, frontal. Nos yeux se posent sur ces quatre mots taillés dans la masse blanche d'un fond blanc, tel un pochoir: HOME AND sont détourés par un frottis au crayon puis positionnés au-dessous de ces derniers: NATIVE LAND presque vierges de tout crayonnage. Deux mains apparaissent et débutent par dé effacer les mots du bas, puis quelques secondes plus tard deux autres mains se présentent et effacent le frottis des mots du haut. Alors c'est une histoire qui débute, quatre mains se font face (ces paires de mains sont les mêmes, réunies dans un cadre grâce à un montage vidéo), deux révèlent et deux autres déconstruisent une symbolique. Cet effet simultané nous interroge, nous perturbe. Pourquoi? L'artiste joue sur notre langage, elle bouleverse notre sens de lecture. En nous trouvant face à cette œuvre, Myre nous demande de rester, de lire, de participer par notre interprétation.

Ce projet fut créé explicitement pour une exposition: Hochelaga revisité / revisited qui se tint au centre artistique MAI à Montréal, du 19 mars au 25 avril 2009. Cette exposition collective se voulait de redéfinir le territoire originel de l'île de Montréal (anciennement appelé Hochelaga par Cartier), dans un rapport conflictuel entre les premiers habitants et la perte d'identité de cette île. Comme le souligne le commissaire de l'exposition Ryan Rice, « L'exposition […] réactualise la présence, l'expérience et la culture autochtone de la ville – trop souvent absentes de l'histoire officielle de cet important lieu de rassemblement – légitimant au passage la souveraineté et l'esprit des premiers gardiens de Montréal» (Rice 2009 : 5). Myre a donc travaillé sur cette ambiguïté entre l'appartenance et l'envie d'appartenance à une terre d'aïeul tout en omettant de définir sa véritable identité.

L'artiste s'est penchée sur l'hymne national canadien, dans sa version anglaise: O Canada! Our Home and Native Land, nous entonne la première phrase de ce chant. En travaillant sur un hymne national, elle travaille sur un acte patriotique qui devient l'ambassadeur d'un pays. L'identité d'une culture est condensée dans un tel texte et donc le mythe triomphaliste y est instauré, invité, loué. Par un simple jeu visuel, elle va déconstruire ce mythe et dénoncer les failles de sa construction. Myre ne revendique pas, mais dotée d'une capacité à trouver les faiblesses d'un système basé sur des mensonges, elle va les décrypter et nous les exposer. Nous avons également un rôle à jouer pour que cette expérience soit complète: se poser des questions sur ces visions ancrées dans notre mémoire collective mais jamais encore traduites. Sans ce désir de découvrir une autre réalité, son message alors devient nul.
Elle nous incite à nous investir dans cette recherche et cela fait partie de sa démarche, car son œuvre est un partage avec l'autre; elle nous demande sans cesse de collaborer. Nadia Myre déconstruit les fondations culturelles nord-américaines pour mieux les redéfinir; l'artiste va insuffler une nouvelle caractéristique à ce mode de pensée que l'on croit immuable, et cette nouvelle identité est: le dialogue. Si l'histoire est complexe et compliquée, elle est également remplie de stéréotypes venant augmenter la vulnérabilité d'un échange, d'une confiance. Son message se veut d'affaiblir la rhétorique colonialiste de l'image politique et historique instaurée, alors que le rôle de l'auteur de l'effondrement de toutes ces idées préconçues nous est proposé. Pour détourner le regard d'une réalité connue, d'un système de pensée ancré, il faut redonner vie à des faits tombés dans l'oubli collectif.

Écrire est un acte qui donne naissance à un terme, à un mot. Ce geste de la main n'est pas un acte anodin; il peut même devenir révolutionnaire. Mais Myre ne réécrit pas l'histoire, elle l'a dissèque. Native Land n'est pas réécrit mais dé effacé, comme nous l'indique Ève de Garie-Lamanque (2010). Ce geste change tout, il fouille, retrouve tel un acte archéologique une identité passée, oubliée, abandonnée. Le retour à ces couches sédentaires nous invite à nous retourner pour voir et surtout analyser ce qu'il s'est passé, pour mieux comprendre le présent. Myre n'est pas dans un désir de retour en arrière, car le passé est le passé; mais elle veut que l'on s'en souvienne à défaut de l'oublier, de le cliver, de le tabouiser dans un mythe devenant, pour une partie de la population, une vérité, un fantasme. Cette recherche nous démontre comment une histoire peut être détournée, relatée en fonction «de». Les mots ont un pouvoir et c'est sur cette manipulation verbale que Myre travaille. Ingrid Jenkner souligne d'ailleurs qu'il est important de « […] considérer le langage comme quelque chose de plus qu'un simple et transparent moyen de communication» (Jenkner 2004 : 43).
Pour ce projet, l'artiste a choisi délibérément l'hymne national en langue anglaise, car les mots choisis ont un réel double sens, renforcé par la double direction de la phrase elle-même. L'ambiguïté de la signification du mot Native 2; est ici décortiquée. Si dans la phrase: Native Land, on comprendra, dans un premier temps, la réminiscence d'un pays natal, d'une appartenance nationale, ce terme est également utilisé pour désigner les premières nations d'Amérique. Est-ce que les «Native» se sentent vraiment dans un «Native Land»? Est-ce que ce pays leur en donne le sentiment? Lors d'une de nos discussions, Ève de Garie-Lamanque m'indiquait à juste titre que les autochtones se sentent comme «des invités chez eux». Ne faut-il pas se pencher sur ce malaise et remonter dans un passé où, sous des gloires continentales, se cache une souffrance? Cette plaie grandit dans le temps comme l'étendue de ce territoire volé et le Home 3 sonne comme un hôtel, comme une chambre louée dans une demeure leur appartenant. Les dynamiques territoriales exercées dans les premiers temps coloniaux résonnent comme une blessure dans un hymne dont ils ne sentent pas inclus.

Notre système d'écriture est renversé, Nadia Myre dé efface les mots Native Land depuis la droite et déconstruit ainsi notre mode de communication. Par ce geste, elle fait réapparaître deux mots qui retrouvent leurs significations mais aussi leurs symboliques perdues; elle se ré attribue alors le Native Land, par cet acte elle se réapproprie ce territoire perdu. Si le fond est dramatique et grave, encore une fois Nadia Myre ne travaille pas dans une revendication, mais utilise ce moyen d'expression comme un outil de résonance face à une interprétation politique et collective de ce chant.

Pour ce projet en particulier l'artiste utilise une gomme à effacer appelée mie de pain. Sa caractéristique principale est qu'elle ne laisse pas de résidus. Cette absorption symbolique implique la mémoire résiduelle de la collectivité autochtone, intégrant des circonstances qui se traduiront en cicatrices pour les générations à venir. Nadia Myre dépose dans ses œuvres un lien au passé qui est l'héritage insondable d'une identité organique.

«Mon travail concerne le pathétique du désir … Mords-moi» 4 (Meier 2004 : 41). Si les émotions reliées aux recherches artistiques de Nadia Myre sont empreintes de pathos, son travail fait preuve d'une pudeur sans égal. Le sentiment pathétique est un élément instable de notre vie affective, alors que les œuvres de Myre sont immuables, comme transposées dans une éternité dont nous sommes ses invités. L'artiste ne nous donne pas des pistes émotives, ne nous oblige pas à suivre un système sensitif particulier; elle nous expose des faits, des enjeux, et ceci tout en retenue. Ce contexte poétique et serein nous demande une pause, nous demande de lire, de comprendre. Un lien s'installe entre l'œuvre et nous; ce tissage se fait en douceur et devient enivrant lorsque l'ouverture se fait en nous, lorsque cet accès inédit se déploie à une nouvelle réalité, à un nouveau regard sur le partage.

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1Je traduis: repenser l'hymne national.
2 Je traduis: natal. Mais c'est aussi le mot anglophone que l'on utilise pour désigner les amérindiens, les premiers habitants d'Amérique.
3Je traduis: maison. Mais cela fait référence au terme home sweet home qui désigne un chez soi, un lieu d'appartenance où l'habitant s'y sent lié.
4 Phrase de Nadia Myre incrustée dans le texte écrit par Rhonda L. Meier «Le poids des choses» du catalogue CONT[R]ACT.

 

Bibliographie

Ouvrages
JENKNER, Ingrid, Gaëtane VERNA et al. (2004). Au-delà des mots, Halifax / Lennoxville: MSVU Art Gallery / Art Gallery of Bishop's University.
MEIER, Rhonda L. (2004). Nadia Myre CONT[R]ACT, Montréal: Dark Horse Productions.
RICE, Ryan (2009). Hochelaga Revisité / Revisited, Montréal: MAI Édition.
TOUGAS, Colette, Édith-Anne PAGEOT et al. (2011). Nadia Myre, Montréal: Art Mûr Édition.
ZORN, Élayne (2008). «Nadia Myre», EVERETT Deborah, Élayne ZORN, Encyclopedia of Native american artists, Westport, Connecticut: Greenwood Press, p. 140 – 141.

Référence électronique
DE GARIE-LAMANQUE, Ève (2011). Rethinking Anthem, 3mNadia Myre.com. Consulté le 12 novembre 2011.

‘RUTH CUTHAND AND NADIA MYRE: CONTESTED TERRITORIES’, CANADIAN ART

TANYA HARNETT

Nadia Myre exhibited four enormous, heavily beaded, graphic identities devoid of text—her Journey of the Seventh Fire series. This series represents logos of Quebec mining and hydro companies, and by omitting the text elements of these corporate graphics, Myre keeps them nameless icons of industry. These works were hung on the far end of Truck’s gallery, so that initially their computer-graphic origins had us reading the images as large, flat fields of pure colour. But in a manner similar to Cuthand’s work, the view seen from a distance is quite different from the one seen under closer inspection. In each piece, there are several hundreds of hours of work executed by people participating in a collective beading.

This sea of beadwork has patches with thousands and thousands of beads, a quantity that prompts us to recognize the time, dedication and contemplation that must have occurred during the act of making these artworks. Here, acting from her own artistic and cultural territory, Myre identifies a corporate collective with an “invisible hand,” and she encourages us to note what that collective is doing to the land. Myre also ensures that these actions are being noted (and made visible) using a widely understood Aboriginal visual language.

Art autochtone: au-delà des clichés

JOCELYNE LEPAGE

La langue et le territoire, on le sait au Québec, définissent une culture, une nation. Que deviennent ceux qui ont perdu l'une ou l'autre, ou les deux? Quelques réponses à la galerie Art mûr, réponses d'artistes autochtones canadiens et américains à qui c'est arrivé.

La vingtaine de participants à cette exposition intitulée Baliser le territoire / A Stake in the Ground, sont reconnus comme artistes. Ils ont été choisis par Nadia Myre, elle-même artiste et autochtone née à Montréal.

Ces artistes sont intégrés au milieu de l'art contemporain canadien ou américain. Certains ont une carrière internationale, comme Rebecca Belmore et Edgar Heap of Birds. Qui ont, l'une, représenté le Canada à la Biennale de Venise, l'autre, les États-Unis. D'autres sont des nouveaux venus comme Michael Patten. Rita Letendre y a sa place, de même que Raymond Dupuis. Oublions donc les clichés sur l'art autochtone traditionnel tourné vers le passé. Ici, les artistes réfléchissent à leur avenir. Ils se posent des questions sur l'acculturation, la perte de possession de leur territoire ou la disparition de leur langue. Ils s'interrogent sur leur identité.

Voici Will Wilson, par exemple, photographié les pieds dans l'eau marécageuse d'un champ inondé, masque sur la bouche, crème sur le visage, yeux rougis. Son message est assez clair. Il n'y a plus moyen de vivre sur ces terres complètement polluées à moins de trouver une Auto-Immune Response (c'est le titre de sa série de photos).

De son côté, Rebecca Belmore a assis un personnage imposant, grandeur nature, sur le plancher, les mains blanches tournées vers le haut, prostré, le visage penché et caché sous de longs cheveux noirs qui se répandent derrière lui pour former une sorte de tapis. Sur son blouson noir, des mots à peine visibles sont cousus, noir sur noir: Fucking Indian dans un sens croise Fucking Artist dans l'autre avec une tache rouge en plein milieu du dos. On comprend que Rebecca Belmore est doublement paria.

Edgar Heap of Birds, d'origine cheyenne, voit rouge dans sa série de messages en blanc laiteux sur des feuilles de papier couleur sang. Il y écrit, par exemple, à la manière des titres dans les journaux américains: «Indian Still Target Obama Bin Laden Geronimo».

Nicholas Galanin met de l'humour dans ses oeuvres, mais son propos est de même nature. Il y a ce loup gris superbe, naturalisé, dont la moitié du corps est étendu pour former un tapis décoratif. Et sur le mur sont alignés des masques typiques des autochtones de la côte Ouest, en porcelaine et non en bois, porcelaine ornée de fleurs bleues comme les services de thé britanniques.

Quelques artistes s'intéressent surtout à la langue qu'ils parlent, ou ne parlent plus. Ainsi, dans une vidéo de Kevin Lee Burton, de jeunes autochtones se confient. L'un dit qu'il ne comprend pas pourquoi ses parents ne lui ont jamais enseigné leur langue, alors qu'ils l'ont fait pour des centaines d'autres. Un autre, Greg Staats, sur vidéo, essaie de parler mohawk en tenant un wampum comme s'il s'agissait d'un chapelet.

Le travail de Raymond Dupuis prend tout son sens dans cet ensemble d'oeuvres. Ses tableaux-collages représentent des territoires urbains balisés sur lesquels s'inscrivent des signes grouillant évoquant surtout la culture des Hopis. Il nous a déjà dit que sa grand-mère lui racontait des histoires en malécite, langue qu'il ne comprenait pas, mais dont il a gardé la nostalgie du rythme.

Et pour finir, cet objet ironique: un bâton de baseball gainé de perles blanches (beads) dont l'extrémité forme une petite carte du Canada couleur sang. Le titre: Native Beating (jeu de mots avec native beading). Du jeune Michael Patten.

La galerie Art mûr, qui vient de fêter son 15e anniversaire, semble à la croisée des chemins entre son statut de galerie privée et ses initiatives de centre d'art. Elle pourra peut-être un jour organiser des visites guidées pour le public, comme celle à laquelle on a eu droit comme journaliste en compagnie d'Ève De Garie Lamanque. Elle offre déjà des petits catalogues, essentiels quand il s'agit d'art contemporain.

Baliser le territoire / A Stake in the Ground à la galerie Art mûr, 5826, rue Saint-Hubert, jusqu'au 25 février.

http://www.lapresse.ca/arts/arts-visuels/201201/28/01-4490366-art-autochtone-au-dela-des-cliches.php

Exposition - Mohawks, Cheyennes, Algonquins... et artistes

Jérôme Delgado

Le cinéma a son Zacharias Kunuk, la chanson, sa Elisapie Isaac et l'art contemporain, un nombre incalculable d'artistes d'origine amérindienne. Mais les connaît-on seulement? L'exposition Baliser le territoire: manifestation d'art contemporain autochtone, à la galerie Art mûr, a comme principal et noble objectif de corriger cette situation. Elle le fait avec éclat: vingt-cinq noms, une centaine d'œuvres et deux étages consacrés à un art qui nous éloigne plus que jamais des stéréotypes de la tête plumée.

Des expositions comme celle-là sont importantes, croit Nadia Myre. Née de mère algonquine, l'artiste âgée de 38 ans connaît du succès depuis plusieurs années, plus particulièrement depuis le projet de longue haleine Indian Act (2000-2003), qui consistait à recouvrir de perles le texte de la Loi sur les Indiens. 

Représentée depuis dix ans par la galerie Art mûr, Nadia Myre agit cette fois comme commissaire. Une première pour elle. «C'était important de le faire. J'ai souvent fait partie d'expos d'art autochtone au Canada, mais pas ici. Ça fait longtemps qu'au Québec on en avait vu.»

C'est Rhéal Lanthier, un des directeurs-propriétaires de cette galerie située aux abords de la Plaza Saint-Hubert, qui l'a poussée à monter l'expo. Elle a accepté puisqu'elle faisait déjà des recherches sur les questions du territoire et sur le cas très précis de Maniwaki. 

Elle s'est mise à recruter ses artistes, dont de gros noms de l'art contemporain au pays (la Vancouvéroise Rebecca Belmore, le Manitobain Robert Houle) et des États-Unis (le Cheyenne Edgar Heap of Birds). Imprégnée de commentaires politiques très forts, Baliser le territoire n'est cependant pas une attaque contre l'establishment blanc. 

Pas plus qu'un cri d'alarme.

«Je ne dénonce pas, j'annonce, dit Nadia Myre. J'annonce que ces artistes font un art contemporain très valide. Je dis que l'on peut faire des expositions d'art amérindien avec des thèmes qui se tiennent. Et que ce n'est pas de l'artisanat.»

Parfois, dans la tête des gens, un fossé sépare art contemporain et cultures autochtones. Myre le reconnaît, mais ça la surprend toujours lorsqu'elle tombe sur une expo où sont véhiculés les stéréotypes les plus lourds. Ça la surprend parce que, dans le milieu «où [elle] navigue, [elle n'a] jamais vu ça».

Les oeuvres réunies à la galerie Art mûr portent néanmoins des traces identitaires propres aux Premières Nations. Que ces oeuvres soient pure abstraction (les tableaux de Rita Letendre, vétéran du groupe) ou témoignages émotifs (les portraits sur vidéo de Kevin Lee Burton). Et la commissaire a constaté que la question territoriale était liée à la langue, «à la capacité de pouvoir parler la langue ancestrale».

Robert Houle peint animé par le rythme des mots en langue saulteaux, qu'il exprime à voix haute, pinceau en main. Greg Staats exprime sa frustration d'être incapable de communiquer en mohawk à travers une vidéo minimaliste. Quant à lui, Arthur Remwick associe la langue officielle imposée à ses ancêtres du Dakota à des signes de ponctuation muets.

Si autrefois Rita Letendre a dû taire son identité abénaquise pour percer, aujourd'hui les 

artistes pensent à l'avenir sans renier leurs origines, considère Nadia Myre. «C'est un peu comme ce qu'ont fait les Québécois dans les années 1960 et 1970, qui se sont tournés vers leur langue pour bâtir leur propre pays.»

Rhéal Lanthier est du même avis. «Les jeunes autochtones n'ont plus honte de dire qui ils sont. Auparavant, c'était une barrière; aujourd'hui, c'est un avantage. Il y a désormais un intérêt pour ces cultures.»

http://www.ledevoir.com/culture/arts-visuels/340759/exposition-mohawks-cheyennes-algonquins-et-artistes

NADIA MYRE: EN[COUNTER]S

This richly illustrated monograph surveys Nadia Myre’s multi-faceted work - installation, photography, sculpture, prints, beadwork, drawings, videos - over the last fifteen years. 

Essays by Sandra Dyck, Amanda Jane Graham, Édith-Anne Pageot, and Colette Tougas. 

96 pages, illustrated, soft cover, bilingual

$45.00

Published by Édition Art Mur in collaboration with the Musée d’art contemporain des Laurentide and the Carleton University Art Gallery. 

Designed by Associés Libres.

purchase catalogue  

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Dans cette monographie de 96 pages, Sandra Dyck, Amanda Jane Graham, Édith-Anne Pageot et Colette Tougas, nous font découvrir à travers leurs textes analytiques la force et la richesse contenue dans les œuvres de cette jeune et déjà incontournable artiste qu’est Nadia Myre. Publiée par les Édition Art Mûr en collaboration avec le Musée d’art contemporain des Laurentides et la Carleton University Art Gallery.

 

Nadia Myre : En[counter]s
Monographie de Nadia Myre
Colette Tougas, Édith-Anne Pageot, Sandra Dyck, Amanda Jane Graham
catalogue 96 pages
Édition Art Mûr, 2011
ISBN 978-2-923243-04-07

LA LIBERTÉ ‘ART VISUEL INSTALLATIONS INTERACTIVES’

CAMILLE SÉGUY

Avec le public...

Comme le montrent trois des quatre œuvres qu’elle expose présentement à la MDA, Nadia Myre aime travailler avec le public. « C’est très nourrissant », affirme- t-elle, tout en rappelant qu’elle n’a pas qu’une seule démarche artistique et mène aussi des projets artistiques seule.

Pour les canevas de cicatrices notamment, « c’était souvent comme un laboratoire ouvert, se souvient-elle. Je laissais des canevas dans les galeries d’art avec une explication, et je laissais les gens venir d’eux mêmes.

« C’était intéressant de les voir faire, conclut-elle. Au départ, certains n’étaient pas prêts à partager ce qui les touche vraiment, mais finalement, quand on fait de la couture, on entre dans une espèce de bulle et on se met à se confier plus facilement. » 

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WASHINGTON POST: NEW 'VANTAGE POINT' SHOW AT AMERICAN INDIAN MUSEUM SHOWS OFF SYMBOLIC POWER

BLAKE GOPNIK

"Indian Act," a work finished in 2002 by Nadia Myre, an Anishinaabe Canadian from the Kitigan Zibi First Nation of Quebec.

For "Indian Act," Myre took the printed pages of the law by the same name, which lays down the legal framework within which Canada's native peoples live. She and 200 friends and volunteers then covered those 56 pages with tiny glass beads in red and white -- the colors of the Canadian flag, but also of much native craft.

Some pages of the act are entirely hidden under the beading; others might only lose half or a quarter of their original text, with the rest left visible for the reading. The beadwork more or less respects the format of the original document: the red is the "page," while the white beads crawl across it in broken lines that evoke the broken lines of text in printed matter.

The beading gives some sense of a crossing out, of a denial and repudiation of the content of the act. You could see it almost as a turning back of the clock, transforming a legal document into a traditional decorative textile, and asserting the power of Indian craft over European law. But meticulously decorating the document also evokes a certain sense of respect for it. You tear up a text you hate, you don't spend vast effort making it more beautiful. There's some sense that, in their beautification, Myre and her collaborators have decided to make the Indian Act their own, for better or worse.