Prix Louis-Comtois et Pierre-Ayot

ÉRIC CLÉMENT LA PRESSE

Nadia Myre et Myriam Dion ont respectivement remporté, vendredi, les prix Louis-Comtois et Pierre-Ayot. Des récompenses de 7500 $ et 5000 $ ont été remises aux deux artistes visuelles par la Ville de Montréal et l’Association des galeries d’art contemporain (AGAC) lors d’une cérémonie organisée au Grand Quai du port de Montréal, dans le cadre de la foire Papier.

Le prix Louis-Comtois récompense Nadia Myre, âgée de 47 ans, qui s’est distinguée depuis les 15 dernières années. Il souligne la qualité de sa production dans le domaine de l’art contemporain à Montréal. Artiste interdisciplinaire, membre de la Première Nation Kitigan Zibi Anishinabeg, Nadia Myre dit être « toujours contente » que son travail soit reconnu et apprécié. La compétition était féroce cette année pour le prix Louis-Comtois. Elle était finaliste avec la peintre d’envergure Janet Werner et l’artiste multimédia mohawk Skawennati, très connue également sur la scène internationale.

Nadia Myre présente à Art mûr en ce moment, et jusqu’au 18 décembre, Eyes Watching and Other Work, des œuvres exposées dans le cadre de la 26e saison de la galerie d’art. Elle les a pratiquement toutes réalisées en octobre. C’est dire combien l’artiste algonquine est productive. « C’est vrai, mais je suis toujours en train de travailler, dit-elle. Toujours en éveil, en train de faire des recherches ! »

L’œuvre la plus marquante est [In]tangible Tangles, une série d’une quarantaine d’images de mocassins perlés provenant de tribus autochtones nord-américaines et issus de la collection du Smithsonian’s National Museum of Natural History de Washington.

Nadia Myre expose aussi une vidéo d’un drapeau unifolié battant au vent sur le bateau d’une de ses amies, au large de Port Alberni (île de Vancouver). Un drapeau dont une partie est effilochée et qu’elle a filmé avant de mettre l’image en synchronisme avec la même image mais inversée, dans une symétrie spatiale décentrée, ce qui donne l’impression de voir un oiseau (un aigle ?), au centre, dont les pattes sont entravées et qui ne peut pas, de ce fait, s’envoler. Tethered (attaché, en anglais) traite ainsi d’un symbole canadien mis à mal ces derniers temps, notamment mis en berne à cause de l’actualité de ces tombes anonymes d’enfants autochtones découvertes au pays.

Nadia Myre expose également Coming to End, bandelette de perles en céramique dans laquelle apparaît l’expression algonquine kidanish kwass signifiant « coming to end » ou « the end is coming ». Une expression ambiguë puisqu’on ne sait pas trop si la fin signifie l’extinction des autochtones ou l’arrêt des violences et des discriminations dont ils ont fait l’objet. La photo d’une vieille balance – l’œuvre Eyes Watching – qui ne donne pas l’équilibre évoque aussi cette quête de justice des autochtones canadiens.

La dernière œuvre, Coda Construction (Revisited), est la suite d’un travail sur les codes amorcé en 2004. Le symbole avec deux L signifie « je ne comprends pas ». Un perlage tissé sur un thème encore une fois lié à la lutte des communautés autochtones pour retrouver leur place sur le territoire canadien non cédé.